06 juillet 2008

Capturer de la valeur

C’est le but d’une entreprise : créer de la valeur qu’on va échanger contre des valeurs sonnantes et trébuchantes qui sont dans le portefeuille des clients. Il n’y a pas que les entreprises qui s’intéressent au portefeuille du public. Il y a le fisc et les voleurs aussi. Je ne vais pas m’appesantir sur le fisc, comme disait je ne sais plus qui, il suffit de se dire qu’on travaille 6 mois par an pour l’état et 6 mois par an pour soi et qu’au bout du compte, en Belgique, surtout, on se trouve en meilleure forme que l’Etat. Il se fait que dans la SA Belgique, nos dirigeants ne se gênent pas pour commettre ce qui est condamné en entreprise : l’abus de bien sociaux. Mais cela sera pour une autre chronique, ce sont les vrais voleurs qui m’intéressent aujourd’hui.

Prenez trois films : The Godfather, Ocean’s 11 à 13 et Reservoir Dogs. Trois films de banditisme où les acteurs principaux s’évertuent à capturer de la valeur.
La Mafia le fait avec une organisation très pyramidale. Il y a le Parrain et puis tout un organigramme de chefs par continent, par pays et par secteur d’activités : la drogue, l’alcool, les syndicats, la prostitution, le transport, les armes, etc. Un structure qu’on retrouverait un peu dans nos grandes entreprises. Vous voyez Etienne Davignon, dans le rôle du Parrain qui évince un de ses lieutenants trop ambitieux qui croyait sans doute pourvoir gérer Brussels Airlines à sa façon. Où alors chez Belgacom, où tout le monde se demande quel sort sera réservé au lieutenant Didier Bellens. Dans tous les cas de figures, ces structures sont des structures mortifères : on y tue le collègue qui fait de l’ombre, on se fout du client parce que ce qui compte c’est ce que pense le chef qui fera son rapport à la hiérarchie. Godfather ,c’est aussi un peu comme l’Open VLD où tout monde s’est vu promettre un portefeuille de ministre mais où très peu l’ont reçu. Fientje Moerman et Rudy Aernoudt n’en sont pas sorti gagnants. On sort rarement gagnant de ces structures-là. Elles correspondent bien, par contre, aux résultats récents d’une étude de monster.be qui révélait que les belges se méfiaient de leurs patrons et ne croyaient qu’en leur chef de département.

Le chef de département, c’est le chef d’équipe. L’équipe, c’est celle d’Ocean’s 11 à 13. Ensemble, on se complète, on respecte la spécialité de chacun, on fédère le talent, on crée des synergies et on braque le casino. Quand on montre les trois affiches de films à des patrons de boîtes ou de ressources humaines, cette affiche fait l’unanimité. C’est la structure dont les entreprises performantes devraient s’inspirer pour capturer plus de valeurs. Facile à dire mais pas facile à faire parce que l’équipe, dans la réalité, doit s’adjoindre des experts imposés qui viennent d’ailleurs et qu’on ne connait pas. L’équipe devient très vite un ensemble de silos étanches qui ne se connaissent pas. On se replie sur soi pour se protéger. Et cela nous rapproche de Reservoir Dogs. Au lieu de créer des synergies on se bat chacun pour sa chapelle et les dysfonctions naissent et s’épanouissent. En fait de valeur l’entreprise devient un foyer de suspicion, de méfiance, de jalousie. Et c’est un bain de sang qui en découle comme dans The Godfather.

Cela semble caricatural et pourtant c’est vrai, faites le test. Tout le monde rêve de bosser dans une entreprise à l’image de Océan 11. Et tout le monde finit dans des situations de crises où on se réfugie derrière la hiérarchie ou dans son silo.

Rien d’étonnant à cela. Et les patrons des grosses boîtes mériteraient tous les salaires gigantesques qu’ils ont s’ils arrivaient à changer cela. Mission impossible.
Fondamentalement, l’entreprise est un des rares groupes humains qui fonctionne en-dessous de l’optimum parce que quel que soit l’industrie dans laquelle elle sévit, elle doit abriter trois cultures différentes qui sont très difficiles à harmoniser.

Ces trois cultures sont liées à trois fonctions vitales et trois types d’économie : il faut des clients et on doit les garder. Première fonction. Première culture, celle du client-roi, du service sur-mesure. L’économie est celle du scope qui doit être le plus large possible.
Pour attirer des clients il faut être différent des concurrents. Deuxième fonction : la création et l’innovation de produits et services que les concurrents n’auront pas. Deuxième culture aussi : celle des créatifs et des ingénieurs inventifs à qui il faut donner toutes les ressources nécessaires à leurs besoins. L’économie, ici, est celle de la vitesse, du time to market. Enfin, comme il y a un actionnaire et qu’il faut rendre des comptes, il y a une troisième fonction dans l’entreprise qui est la fonction administrative et financière : les bean-counters. Une troisième culture évidemment, celle de la standardisation , de la simplification, celle de « la même règle pour tous » qu’ils soient créatifs ou clients ou cadres. Ici nous sommes dans
l'économie d’échelles, ennemie de la création de différence puisqu’elle crée la convergence, la commoditisation. L’agence de pub et l'entreprise media sont un microcosme où ces fonctions et ces différences sont exacerbées.


Si petite que soit l’entreprise, la tâche est complexe. Mais plus elle est grande, plus c’est difficile. Heureusement avec les nouvelles technologies, l’entreprise finira par se structurer différemment. Elle se concentrera sur ce qu'elle fait le mieux et délèguera à l’extérieur ce qu’elle fait moins bien. La structure des entreprises de demain sera moléculaire. P&G s’y met. Nokia y est. 3M le fait depuis longtemps.

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